Voici les ouliés de Gbagbo

Publié le par sethkokorussie

Palais présidentiel (Acte III)/ Le pouvoir l’a rendu ingrat

Laurent GBAGBO-2Quand tu ne sais pas d’où tu viens, même quand tu sais où tu vas, le chemin à parcourir comporte toujours des embûches difficiles à éviter. Il en est ainsi comme il va de la solidarité ou du devoir de reconnaissance vis-à-vis des anciens compagnons de galère. Le président Houphouët-Boigny a laissé comme réputation, celle de quelqu’un qui a toujours tenu ses compagnons de lutte par la main. Peut-on dire la même chose de l’actuel chef de l’Etat? Rien n’est moins sûr. Remontons le temps pour nous interroger sur le sort qui a été réservé à des anciens camarades de lutte du secrétaire général du FPI, apparu au grand jour, à ses côtés ou sur le front du combat politique, à la faveur du retour du pays au multipartisme.


l Paul Arnaud,
l’homme d’affaires
Le 4 mai 90, quand le Front populaire ivoirien fait sa première apparition publique à travers une conférence de presse animée par son secrétaire général, Laurent Gbagbo, au Plateau, Paul Arnaud en est le maître de cérémonie. Cet ancien cadre de l’EECI converti en homme d’affaires se verra confier la lourde tâche de donner au nouveau parti politique un journal pour faire connaître et faire passer ses messages. Après mille péripéties, naît l’hebdomadaire Le Nouvel Horizon dont le succès est immédiat. Ensuite, la maison s’agrandit d’un quotidien, La Voie qui deviendra plus tard, Notre Voie qui fut un autre succès commercial et éditorial. Malgré ou à cause de ces succès, Paul Arnaud connaîtra la descente aux enfers. Ses compagnons de lutte l’accuseront d’avoir détourné près de 700 millions de FCFA des recettes des différentes publications. Il fera sept mois de prison et en sortira sans que la Justice ne soit parvenue à confirmer ni à infirmer cette accusation. Depuis, «le frère de village» de Laurent Gbagbo, Paul Arnaud étant métis de père français et de mère originaire de Gagnoa, ne reviendra plus en grâce auprès de son parent et ne retrouvera plus sa place au FPI. Parvenu au pouvoir, Laurent Gbagbo ne se souviendra pas non plus des services rendus par ce dernier malgré tout, pendant que c’était dur, très dur.

l Blé Charles,
l’Américain
Au FPI, on appelait ce natif de Saioua, l’Américain, en raison de son style et pour avoir effectué une partie de ses études dans le pays de l’oncle Sam. En 1990, au moment où le pays retourne au multipartisme, cet économiste qui a investi dans l’assurance est un homme d’affaires prospère. Il s’investira corps et âme dans le financement du nouveau parti, le FPI qui prétendait ouvrir des perspectives heureuses pour le pays. A Saïoua, dans sa ville natale, Blé Blé Charles ne regardera pas à la dépense. Le FPI reposera sur ses épaules. C’est donc à juste titre qu’il en devient maire en 1995, après la victoire qu’on lui a volée en 1990. L’Américain, au moment où le FPI faisait ses premiers pas, faisait partie de ses financiers les plus en vue. Et comme il en était ainsi, sa côte de popularité grimpait, grimpait et grimpait auprès des militants. Elle grimpait tellement que le secrétaire général et ensuite président du parti, Laurent Gbagbo, en prit ombrage. Comme il ne peut avoir deux capitaines dans un même bateau, le premier capitaine s’est mis à étouffer la naissance du second. Ainsi donc, le maire de Saïoua s’est vu opposer dans son propre fief, ses propres lieutenants. Et pour l’enfoncer d’avantage, l’un d’entre ceux-là, en l’occurrence, Bohoun Bouabré ou «Petit Paul», fut nommé ministre de l’Economie et des Finances. Bien avant, toute la Côte d’Ivoire aura suivi l’épisode de la nomination à la Commission électorale de Blé Blé Charles par Guéi. Nomination qui irrita fortement Laurent Gbagbo. Désormais aux affaires, celui qui s’était autoproclamé rival de ce financier du FPI, avait désormais entre les mains, toutes les cartes pour écraser son « rival » et il le fit. Les affaires de Blé Blé Charles périclitent. Il se réfugie à l’étranger, plus précisément aux USA. A son retour, en 2007, il crée un parti politique, l’Alliance nouvelle pour la démocratie en Côte d’Ivoire-Justice-développement et Paix. En raison des services rendus, les populations, surtout celles de sa région natale, lui réservent un accueil favorable. Devant ce succès relatif, les tenants de la thèse de «Gbagbo est ton frère, viens avec lui» et autres laveurs de consciences, utilisant un discours tribal, mais aussi des difficultés de la vie, ont amené Blé Blé Charles à faire un retour perdant au FPI. Depuis, il est rentré dans les rangs pour ne pas dire qu’il est tombé dans les oubliettes pour la gloire «du frère Gbagbo».

l Dassé Henri,
pharmacien de service
A Gagnoa, dans le temps, tout se passait au domicile de ce pharmacien qui avait, pratiquement abandonné son office de Soubré, pour venir faire la politique aux côtés de Laurent Gbagbo. Quand le leader du FPI était en séjour dans la capitale du Fromager, Dassé Henri lui offrait gîte et couverts. Tout se faisait chez lui. Tout provenait de chez lui. Sa villa sise à Babré se transformait très rapidement et très souvent en QG. Au moment où la conquête du pouvoir était rude et que les candidats à des postes électifs pour le compte du FPI, ne couraient pas les rues, Dassé Henri fut l’un de ceux qui ont accepté de croiser le fer avec les tout puissants cadres du PDCI de la région. Il fut même élu député dans la circonscription électorale de la Sous-préfecture de Gagnoa. (1990-1995). Donc, quand le FPI prend le pouvoir, tout naturellement, on voyait ce natif du canton Dia aux premières loges de la République. On ne sait pour quelles raisons capitales, le pharmacien de Soubré dont l’office est en gérance, traîne aujourd’hui dans la rue de la capitale comme une âme en peine. On ne sait pas pourquoi Dassé Henri peut broyer du noir alors que Laurent Gbagbo est chef de l’Etat. Il paraîtrait qu’il y a entre le détenteur de la signature et lui, un problème de femme. Ceci peut-il vraiment expliquer cela, même si l’information était vraie? Malheureusement, il nous revient que dans cette République des socialistes ivoiriens, ce motif est plus grave qu’un meurtre.


l Arsène Sibailly,
ancien maire de Gagnoa
Encore un autre pharmacien! Arsène Sibailly fait partie du groupe de jeunes pharmaciens, originaires de la région du Fromager, qui se sont jetés corps et âme dans la lutte politique au niveau du FPI, à l’occasion du retour du pays au multipartisme. En raison de leur réussite sociale, ils ont constitué, d’une manière ou d’une autre, le groupe de soutien qui a permis à ce parti naissant de fonctionner relativement bien. Elu maire de Gagnoa, Sibailly était donc prédestiné à une carrière politique acceptable. Mais, non seulement son parti en 2000, ne lui a pas renouvelé sa confiance, pis il l’a fait disparaître des tablettes des hommes à promouvoir. A présent, Laurent Gbagbo, pour des raisons qu’il a dû expliquer à ses militants, lui préfère Ottro Zirignon, ancien militant très actif du PDCI, bombardé PCA de la très juteuse Société ivoirienne de raffinerie (SIR). Ce dernier, dit-on se serait montré très actif au moment où le candidat du FPI affrontait celui du Peuple, le Général Guéi. Comme si ceux qui ont couru à la rencontre de la victoire avait plus de mérite que ceux qui ont dormi dans les tranchées quand la situation n’offrait aucune perspective.

l André Kakahio,
l’infirmier mort de chagrin
Certes, il ne fut pas une grande figure nationale, mais André Kakahio ou André K, cet infirmer-dentiste, vivant à Divo et ayant une clinique à Garahio (Gagnoa) était un grand nom dans les rangs du FPI dans le Fromager. Les militants de ce parti se souviennent encore de lui, des séminaires qu’ils organisaient ici et là pour faire «connaître le FPI et ses idéaux». Il ne jurait que par et pour le FPI. Comme à l’époque, ce parti «n’en avait pas encore un peu», vous imaginez aisément quel a pu être la contribution de ce dernier à l’implantation du FPI. Quand donc, Laurent Gbagbo parvient au pouvoir, l’Infirmier, ne pouvait que remercier le ciel pour une telle grâce. Malheureusement, au lieu de récolter les fruits de son labeur, une rumeur, sortie on ne sait d’où, fait croire qu’André Kakahio, après avoir porté le FPI au pouvoir, s’apprête à tuer Laurent Gbagbo, le nouveau président, en sorcellerie. Et voilà l’infirmier à la retraite devenu l’ennemi du régime et l’homme à écarter des yeux de Laurent Gbagbo. Prenant l’affaire au sérieux, le nouveau président de la République inscrivit André Kakahio sur la liste de ceux «qui ne deviendront jamais rien tant qu’il sera au pouvoir». Et donc qui ne doivent pas l’approcher. Jusqu’à ce qu’il meure, il y a deux ou trois ans, ce militant de première heure du FPI racontait, par chagrin, son histoire à tous ceux avec qui, il voulait partager son désarroi.

Elle est longue, très longue, la liste de ceux que Laurent Gbagbo a abandonnés au bord de la route pour des raisons parfois puériles. Il n’y a qu’à voir la qualité de ceux dont, les plus connus, nous parlons pour comprendre que côté reconnaissance, l’actuel chef de l’Etat, n’est pas un champion. Malgré toutes les qualités que les profiteurs et autres opportunistes lui attribuent pour le besoin de la cause. A côté des désillusionnés et des oubliés du FPI, l’on pourrait même ajouter, sans ennuyer nos lecteurs, un chapitre relatif à ceux qui ont sauté du navire avant qu’il ne devienne ivre et que ses équipages ne se mettent à tirer à balles réelles sur des populations qu’ils sont censés venir sauver. On peut parler du cas de l’ancien ministre Louis-André Dacoury-Tabley. «Le frère», l’ami de très longue date de Laurent Gbagbo, ancien pion important dans le dispositif de ce parti quand il était dans l’opposition. Dacoury a quitté Laurent Gbagbo et le FPI pour rejoindre les rangs de la Rébellion. On peut également citer Raphaël Lakpé, l’éditorialiste de la génération 90, presque un héros, qui a dirigé de main de maître, le groupe de presse du FPI de 90 à 95 et qui a rejoint l’ennemi juré, Alassane Damane Ouattara, ancien allié du Front républicain. Il y aussi Kalifa Touré, Bamba El Hadj, Bamba Maurice…des figures emblématiques du Front populaire ivoirien qui ont rompu les amarres avec leurs anciens camarades parce que ce parti n’est plus ce qu’il avait dit qu’il serait, la gestion de Laurent Gbagbo étant à l’antipode des promesses faites. Mais tout cela est une autre histoire.

Daniel K. Bah



Guillaume Soro à ‘’Jeune Afrique’’:
“Gbagbo n'a jamais fait du désarmement, un préalable à l'élection”
« (…) J’ai signé un accord avec Laurent Gbagbo, (…) pas avec son entourage. (…) En l’espèce, je considère que, tant que le président de la République ne m’aura pas parlé de cette affaire de désarmement - ce qui relève de son choix souverain - ce problème n’a pas lieu d’être. (…) Le chef de l'Etat, que je sache, n'a jamais fait du désarmement un préalable à l'élection (…) On n'attend pas que le dernier soldat ait déposé son arme pour aller voter (…) ». C’est la réponse, on ne peut plus claire, de Guillaume Soro, Premier ministre et Secrétaire général des Forces nouvelles sur la question du désarmement que le clan présidentiel brandit comme u chiffon rouge, à son endroit. Une question qui semble troubler le sommeil des partisans de la Refondation. De Pascal Affi N’Guessan à Charles Blé Goudé en passant par Alcide Djédjé, chacun bande ses muscles en exigeant le désarmement ici et maintenant. Mais le locataire de la Primature indique que ses cris d’orfraie n’effraie guère. Pascal Affi N’Guesan?:« (…) Tout président du FPI qu’il est, (…) il n’a pas été associé à l’Accord de Ouagadougou du 4 mars 2007, et je ne suis pas sûr qu’il le comprenne». Et Alcide Djédjé alors ? « (…) Il aurait dû s’assurer auparavant que non seulement le chef de l’Etat, mais aussi le Premier ministre étaient en phase avec la version de son allocution. Il est l’Ambassadeur de l’Etat de Côte d’Ivoire et non celui du FPI». Mais, si cela peut les contenter, voici la proposition que leur fait Guillaume Soro: « (…) S'il s'agit de rassurer le camp présidentiel (...), j'ajoute ceci : au nom des Forces nouvelles, je m'engage à ce que, le jour J, aucun électeur ne soit empêché d'aller déposer son bulletin dans l'urne et qu'aucune urne ne soit escamotée (…) » A la question de savoir s’il est sûr que les trois poids lourds de la scène politique ‘’veulent vraiment de cette élection présidentielle, le Premier ministre n’en demeure pas moins convaincu : « a priori oui, puisqu’ils se disent tout trois persuadés de l’emporter. M. Ouattara m’assure qu’il va gagner. M. Bédié me jure qu’il va faire un raz-de-marée et M. Gbagbo se dit qu’aucun des deux ne peut le battre. J’en conclus donc qu’ils sont pressés d’en découdre et je n’ai aucune raison de ne pas leur accorder de crédit (…)»
Interrogé sur ce qu’il est convenu désormais d’appeler ‘’l’Affaire Mambé’’, M. Soro répond : « Je n’ai pas le sentiment qu’il ait voulu frauder délibérément. Ce serait trop gros et tôt ou tard, cela serait apparu. Non, c’est une maladresse. En d’autres termes : responsable mais pas coupable. Cette affaire aurait d’ailleurs très bien pu être réglée dans le cadre d’une simple enquête interne, mais dans le processus ivoirien marqué par la suspicion et la méfiance, rien n’est anodin» a-t-il précisé. Une belle façon de ‘’laver’’ l’ex-président de la Commission électorale indépendante (CEI), Robert Beugré Mambé accusé par le pouvoir d’avoir tripatouillé la liste électorale provisoire. Toute chose qui a créé une crise politique qui a abouti à la double dissolution de la CEI et du gouvernement. Pourquoi cette crise qui a emporté le gouvernement Soro I et Mambé ne l’a pas emporté, lui Guillaume Soro? Ou pourquoi, n’a-t-il as démissionné? «Je me suis donné le temps de la réflexion avant d’accepter formellement ma propre démission (…) Je consulte mes collaborateurs dont l’avis est nettement partagé ; certains souhaitent ouvertement que je rende le tablier. En définitive, je prends ma décision, seul face à mon destin (…) » rassure-t-il. Avant de revenir sur les coulisses de la dissolution de son équipe: comment Gbagbo l’a d’abord convoqué le 11 février, pour lui annoncer qu’il allait dissoudre le gouvernement et la CEI le lendemain. En tout état de cause, une interview-vérité qui a le mérite de recadrer les choses et de situer les uns et les autres sur la réelle volonté du chef du gouvernent de sortir le pays de la crise. Seule ombre au tableau, Guillaume Soro n’a pas dit exactement la date des élections. Se contentant tout simplement de dire: «J'ai du mal à imaginer que le 7 août prochain, jour de notre fête nationale et du cinquantième anniversaire de notre indépendance, la Côte d'Ivoire n'aura pas encore dépassé cette échéance. Dans le cas contraire, la fête risque d'être bien triste», ajoute le chef du gouvernement et de l'ex-rébellion des Forces nouvelles (FN).
Yves-M. ABIET

source LE PATRIOTE

Publié dans Abidjan News

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